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Ouvrages cités :
- Je ne suis pas un héros, Gallimard 1993 - Toute une vie bien ratée,Gallimard 1997 - C’est tous les jours comme ça, Finitude 2010, Prix Loin du marketing 2010, Grand Prix de l’Humour Noir Xavier Forneret 2011 |
Préliminaires, quelques jours auparavant, à la médiathèque. Des ouvrages de l’écrivain sur un présentoir. Quelques ouvrages tirés des rayons (ou des réserves peut-être) qui sentent le vieux, même débarrassés de leur poussière : Les radis bleus publiés au Dé de la même couleur (coïncidence ?), quelques folios aux pages jaunies. Pierre Autin-Grenier serait-il un fossile qu’on tirerait du formol le temps d’une soirée ? Envie de lire repoussée, il faut arriver neuf à l’évènement.
Le jour dit, à l’heure annoncée, la foule, j’ose avancer une centaine de participants (chose assez rare pour une lecture). Des têtes blondes, brunes, le visage lisse, pas une ride. Ils se connaissent. Des classes entières. Quelques poètes connus dans la région. Une bonne poignée de non identifiés dominante grisonnante. Alors que la file d’attente s’épuise au check-point, une voix de basson demande s’il doit lui aussi se munir d’un billet pour entrer. C’est l’auteur qui poursuit sur une autre vanne. Concentration dans la blague ou tendance naturelle à manier l’humour ? Quelques minutes plus tard, les fesses débordent du mince gradin, les genoux sont pliés en accordéon, l’invité n’est toujours pas là, problème de billet ? Enfin, le voici, précédé par l’animateur de la soirée.
Plus court sur pied que laissait penser le cliché, l’homme s’approche avec lenteur de la table basse. Très stendhalien, en rouge sang frais et noir, il se débarrasse de sa veste sombre, de l’écharpe rutilante, pour s’asseoir en chemisette mosaïque italienne et en pantalon coquelicot. Le préambule du meneur de soirée est inaudible, il s’entête à rejeter le micro. Par bonheur, les étudiantes chargées de détailler le CV n’ont pas de ces préjugés, l’invité non plus, même s’il se tient à distance. Ce dernier parle peu, suffisamment pour mettre le public dans sa poche, et s’embrouille un peu dans ses textes, mais il lit avec un grand talent, c’est-à-dire lentement et distinctement, respire, joue avec les tons, et cela sonne, résonne à merveille, normal quand on a ainsi une caisse de résonance garantie Ivan Rebroff. À chaque galipette du texte, le public répond en s’esclaffant et rit de bon cœur.
Dès le premier texte, le ton est donné. « Je passe mon temps à prendre des notes sur le petit carnet quadrillé gainé de cuir noir qui partout m’accompagne… Si je croise dans la rue un éléphant triste, je le note… Les réflexions, maximes, sentences et aphorismes, il les aligne par kyrielles en étourdissants chapelets de saucisses fumées. » Au début, on le croit parce qu’on en connaît d’autres qui font de même. Que le répertoire du carnet soit utilisé pour les vœux de bonne année, on suivrait encore si ce n’était au mois d’août. Quelques lettres du Montana plus tard, on nage en plein doute. Quand les fourmis arrivent et qu’il leur dit merci, on comprend qu’il n’y a rien à comprendre, que le fossile est bien vivant, merci pour lui, qu’il nous mène en barque et qu’on nage en plein humour, un humour noir à décrocher un prix, ce qui est le cas puisqu’il obtient le Grand Prix de l’Humour Noir Xavier Forneret en 2011 pour son ouvrage C’est tous les jours comme ça.
Les textes lus prennent l’autoroute à contresens, tournent le bon sens en dérision, tout en économie ne s’embarrassent pas de fioritures, déjantent les mots les plus simples en histoires rocambolesques qui montrent à leur façon des angles souvent inexplorés de l’existence. La course contre le cancer du poumon prend le poncif à rebrousse-poil mais, qui sait, dans ces chemins ignorés, il y a peut-être à réfléchir et vérité à trouver.
Que sont les textes de Pierre Autin-Grenier ? Des nouvelles brèves ? Cela se pourrait au vu des chutes assez renversantes qui terminent ses textes. L’insignifiance des situations, leur inactualité, traduisent un autre regard, celui du poète dans une prose débarrassée de contraintes, libre comme l’air de conduire le lecteur comme il veut et où il veut, de lui faire croire à des autobiographies impossibles, de le débarrasser de ses préjugés ou idées toutes faites pour le rendre libre et disponible. Mission réussie.
Il était parti pour des heures. Il a fallu l’arrêter dans sa lecture. Car s’il a le débit lent et l’allure placide, l’enthousiasme reste tenace, ne vient-il pas la veille de sortir un nième ouvrage Quand j’étais écrivain, un titre en trompe-l’œil une fois de plus, ce qui dénote non pas une fossilisation mais une vraie longévité. Et cela c’est un signe qui ne trompe pas.
Le jour dit, à l’heure annoncée, la foule, j’ose avancer une centaine de participants (chose assez rare pour une lecture). Des têtes blondes, brunes, le visage lisse, pas une ride. Ils se connaissent. Des classes entières. Quelques poètes connus dans la région. Une bonne poignée de non identifiés dominante grisonnante. Alors que la file d’attente s’épuise au check-point, une voix de basson demande s’il doit lui aussi se munir d’un billet pour entrer. C’est l’auteur qui poursuit sur une autre vanne. Concentration dans la blague ou tendance naturelle à manier l’humour ? Quelques minutes plus tard, les fesses débordent du mince gradin, les genoux sont pliés en accordéon, l’invité n’est toujours pas là, problème de billet ? Enfin, le voici, précédé par l’animateur de la soirée.
Plus court sur pied que laissait penser le cliché, l’homme s’approche avec lenteur de la table basse. Très stendhalien, en rouge sang frais et noir, il se débarrasse de sa veste sombre, de l’écharpe rutilante, pour s’asseoir en chemisette mosaïque italienne et en pantalon coquelicot. Le préambule du meneur de soirée est inaudible, il s’entête à rejeter le micro. Par bonheur, les étudiantes chargées de détailler le CV n’ont pas de ces préjugés, l’invité non plus, même s’il se tient à distance. Ce dernier parle peu, suffisamment pour mettre le public dans sa poche, et s’embrouille un peu dans ses textes, mais il lit avec un grand talent, c’est-à-dire lentement et distinctement, respire, joue avec les tons, et cela sonne, résonne à merveille, normal quand on a ainsi une caisse de résonance garantie Ivan Rebroff. À chaque galipette du texte, le public répond en s’esclaffant et rit de bon cœur.
Dès le premier texte, le ton est donné. « Je passe mon temps à prendre des notes sur le petit carnet quadrillé gainé de cuir noir qui partout m’accompagne… Si je croise dans la rue un éléphant triste, je le note… Les réflexions, maximes, sentences et aphorismes, il les aligne par kyrielles en étourdissants chapelets de saucisses fumées. » Au début, on le croit parce qu’on en connaît d’autres qui font de même. Que le répertoire du carnet soit utilisé pour les vœux de bonne année, on suivrait encore si ce n’était au mois d’août. Quelques lettres du Montana plus tard, on nage en plein doute. Quand les fourmis arrivent et qu’il leur dit merci, on comprend qu’il n’y a rien à comprendre, que le fossile est bien vivant, merci pour lui, qu’il nous mène en barque et qu’on nage en plein humour, un humour noir à décrocher un prix, ce qui est le cas puisqu’il obtient le Grand Prix de l’Humour Noir Xavier Forneret en 2011 pour son ouvrage C’est tous les jours comme ça.
Les textes lus prennent l’autoroute à contresens, tournent le bon sens en dérision, tout en économie ne s’embarrassent pas de fioritures, déjantent les mots les plus simples en histoires rocambolesques qui montrent à leur façon des angles souvent inexplorés de l’existence. La course contre le cancer du poumon prend le poncif à rebrousse-poil mais, qui sait, dans ces chemins ignorés, il y a peut-être à réfléchir et vérité à trouver.
Que sont les textes de Pierre Autin-Grenier ? Des nouvelles brèves ? Cela se pourrait au vu des chutes assez renversantes qui terminent ses textes. L’insignifiance des situations, leur inactualité, traduisent un autre regard, celui du poète dans une prose débarrassée de contraintes, libre comme l’air de conduire le lecteur comme il veut et où il veut, de lui faire croire à des autobiographies impossibles, de le débarrasser de ses préjugés ou idées toutes faites pour le rendre libre et disponible. Mission réussie.
Il était parti pour des heures. Il a fallu l’arrêter dans sa lecture. Car s’il a le débit lent et l’allure placide, l’enthousiasme reste tenace, ne vient-il pas la veille de sortir un nième ouvrage Quand j’étais écrivain, un titre en trompe-l’œil une fois de plus, ce qui dénote non pas une fossilisation mais une vraie longévité. Et cela c’est un signe qui ne trompe pas.
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