samedi 22 janvier 2022

Milan KUNDERA - La vie est ailleurs



Un Milan Kundera inconnu, déniché par hasard dans une boite à livres, ne peut laisser indifférent qui a lu par le passé, et apprécié, une grande partie de ses ouvrages, L’insoutenable légèreté de l’être, bien sûr, mais aussi La lenteur, L’immortalité et quelques autres. Son dernier ouvrage paru en 2014, La fête de l’insignifiance, avait un peu déçu, mais l’avait-on bien lu ? Pour en avoir le cœur net, l’heure était venue de reprendre contact avec l’œuvre de l’écrivain, ne serait-ce par le moyen d’un simple livre de poche Folio datant de 1993 avec ce titre énigmatique La vie est ailleurs. 480 pages écornées et défraîchies, la tranche jaunie, mais l’illustration de couverture intacte représentait une œuvre de Picasso, Femme couchée lisant.

Découverte en fin de lecture, la postface de François Ricard (1978) explique avec clarté comment l’auteur, sous le couvert d’un simple récit, la vie du lambda Jaromil de la conception à sa disparition, met le lecteur «  en question de manière irrévocable. S’y livrer, y consentir, c’est risquer d’être entraîné beaucoup plus loin qu’on ne l’aurait d’abord cru, jusqu’à une sorte de limite de la conscience. » La vie est ailleurs n’y déroge pas. La table en début d’ouvrage, Le poète naît… Le poète se masturbe… Le poète court… Le poète est jaloux.. Le poète meurt… annonce clairement le sujet de l’ouvrage : la poésie.
La poésie est-elle un état inné ou acquis ? Quand votre cour d’admiration se résume à votre propre maman, qui note la moindre de vos sorties, célèbre votre première rime,  on va dans les bois, le cœur est en joie, dans un contexte clos réduit au couple mère-fils en l’absence du père, où chacun a besoin de l’autre en même temps qu’il le contrôle, quand l’échange se réduit à la marge en se cachant l’essentiel, le manque apparaît, le besoin de s’ouvrir, de s’offrir à d’autres devient essentiel et le premier venu, pour peu qu’il dispose d’un peu de savoir faire, un simple peintre lui-même à la recherche de son propre art, sera le bienvenu, comme tous ceux qui suivront Tel sera le destin du jeune poète : à la recherche de la moindre satisfaction, « En même temps, il était flatté ; le peintre le présentait en disant qu’il écrivait des vers excellents et parlait de lui comme si ses invités le connaissaient déjà par ouï-dire », gauche d’inexpérience dans sa propre quête, prêt à porter le flambeau du jusqu’au-boutiste, mais incapable apporter le bonheur autour de lui, cible des profiteurs dont le seul talent sera de savoir arriver à leurs fins, il disparaîtra sans laisser de traces. À son image, certains qui ont partagé sa route ne se sont pas arrivés à leurs fin et sont tombés dans l’anonymat, d’autres qu’il avait déçus ont pris un autre chemin, conscients peut-être que La vie est ailleurs.
«  Seul le vrai poète sait comme il fait triste dans la maison des miroirs de la poésie…Mais attention ! Dès que les poètes franchissent par erreur les limites de la maisons des miroirs, ils trouvent la mort, car ils ne savent pas tirer, est s’ils tirent ils n’atteignent que leur propre tête. »


Titre  : LA VIE EST AILLEURS

Auteur : Milan KUNDERA

Edition : Folio

Dimension : 11X18 cm

Nombre de pages : 480 pages 

ISBN :
978-2-07036834-3

Publication : septembre 1976